« Ensemble ils avaient eu des désirs d’ailleurs, mais ce n’était jamais un ailleurs misérable. Le dénuement pour vivre mieux, pas pour mourir. La vie dans des huttes, si l’on voulait, mais dans une ambiance détente, où ne se trouverait aucun clochard. Ils auraient eu peur de rencontrer de vrais pauvres. Enseignante en banlieue nord, Noémie en fréquentait pourtant tous les jours, mais c’étaient des pauvres accessibles, qu’on aimait instruire, issus de la diversité, et qui l’enrichissaient de leurs différences. Avec les autres, on ne savait pas, c’était trop loin, ils avaient sans doute des maladies, des bras en moins. Ce loin pourtant qu’ils chérissaient se devait de comporter des dangers, des surprises. Ils s’y préparaient pour quand ils se décideraient à franchir le pas, aller là-bas, à l’autre bout de la Terre, sans savoir où. »
Nous sommes jeunes et fiers est le récit d’un retour aux sources. Mais quelles sources convoque-t-on lorsque celles-ci renvoient au désir d’un monde débarrassé de civilisation ? Produits des discours publicitaire, écologique et culturel, Ivan et Noémie, nouveaux Adam et Ève à l’insatisfaction permanente, bercés par le voeu chimérique d’une vie plus vraie, sont les figures tragiques d’une époque où la quête de sens prend parfois la forme inattendue d’un voyage sans retour.