« En écrivant ce livre sur mon père, j’ai découvert que ce que nous recueillons de nos parents, et dont il est beaucoup plus difficile de se débarrasser que de leurs idées, ce sont leurs affects, vivante et palpitante matière transmise à leur insu et au nôtre, irrémédiablement. On connaît, sans mots, sans discours, intuitivement, les cordes et les accords blessés, les joies aussi, sur lesquels ils sont bâtis et qui fournissent, par legs inconscient, notre ossature. Puis on passe une vie à essayer de s’en accommoder. J’ai toujours été bouleversée, et cela est vrai pour mes deux parents, de si bien savoir, pour l’avoir constamment éprouvé, ce qu’ils sentaient. Et – tant pis pour l’air de sentimentalisme – il y a (avait) une telle beauté, alliée à la fragilité, dans ce monde affectif et moral, que je ne peux cesser d’en avoir le coeur étreint. »