LA DISPARUE DE SAN JUAN, Argentine octobre 1976
Philippe Broussard
Février 2011, 442 pages
Marie-Anne Erize avait 24 ans, un physique de mannequin, des utopies de rebelle. Un jour d’octobre 1976, des militaires en civil l’ont enlevée à San Juan, petite ville du nord-ouest de l’Argentine. Ses parents, ses amis, ses six frères et soeurs ne l’ont jamais revue. Depuis, elle fait partie des 30 000 disparus de l’époque de la dictature dont le souvenir hante à jamais ce pays à la mémoire lourde.
Peu importe que cette histoire remonte à plus de trente ans. Philippe Broussard a voulu la raconter. Partir sur les traces de Marie-Anne. Retrouver des témoins. De Paris à Buenos Aires, il a interrogé des dizaines de personnes et tenté d’assembler le puzzle de sa vie. De ses vies, plutôt. Née dans une famille de « pionniers » français établis en Argentine, elle a grandi dans la jungle, fréquenté diverses écoles catholiques, défilé comme top-modèle, côtoyé de grands artistes (le chanteur Georges Moustaki, le guitariste Paco de Lucia…) et vécu un temps à Paris.
Son destin bascule en 1973, quand elle renonce au milieu de la mode, trop superficiel à ses yeux. Militante péroniste, aidesociale dans les bidonvilles, elle entre peu à peu dans la clandestinité au sein des Montoneros, une guerilla d’extrême gauche. Cette fuite en avant, sur fond de repression ultra-violente, s’achèvera à San Juan, un vendredi de 1976…
L’histoire n’est pas terminée pour autant. Aujourd’hui encore, deux procédures judiciaires sont en cours, en France et en Argentine, pour connaître la vérité sur son sort. Un suspect est même en prison, à San Juan : Jorge Olivera, un colonel devenu avocat, catholique intégriste et militant d’extrême-droite. C’est lui qui aurait organisé le rapt, puis la disparition de la belle Française.
Le livre repose sur une structure narrative à deux vitesses : l’alternance entre le récit chronologique du parcours de Marie- Anne et des lettres que l’auteur écrit à sa mère, âgée de 84 ans, afin de l’informer de ses recherches et de lui dévoiler la part d’ombre de sa fille.