Rédigés au fil de l'année 1933, parallèlement aux Cloches de Bâle, recueillis en février 1934 pour être dédiés aux contre-manifestants "tombés les neuf et douze février dans la lutte antifasciste", les poèmes d'Hourra l'Oural excèdent ce que titre et programme peuvent avoir d'attendu : c'est du concert d'Oural que naîtra, cinq ans plus tard, la chanson du Crève-coeur.
Sous les dérives de la propagande, inégalement évitée, Aragon conquiert un rythme : tumulte des machines, vacarme du monde, sarcasme permanent et perpétuel mouvement du poète font s'entrechoquer enthousiasme et colère, poing levé et rire de biais. La rage ainsi sans cesse se mâtine d'ironie :
Et les mots s'égrenaient s'engrenaient à la fresque immense où dans un coin Détail un mammouth forgeron regarde avec tendresse un tout petit Lénine en plâtre
Poème-affiche, poème-tract, mais plus que cela : poème-cri, Hourra l'Oural nous replace face à l'Histoire, dans ses stridences sans doute, mais aussi devant la vérité d'une voix qui n'a jamais, au risque de se perdre, tenté de s'abriter.