« Longtemps, j’ai cru que j’avais été guillotiné dans une vie antérieure. Cet aveu a toutes les allures d’une énormité, je sais. Tout ce que je puis dire à ma décharge est que ma croyance est révolue – quoiqu’elle fasse encore partie de moi. Il y a quinze ans, souffrant de problèmes de dos, j’ai consulté sur le conseil d’une amie un masseur versé en sophrologie. Tout en me pétrissant les lombaires, il m’a questionné sur mon passé. Avec une certaine réticence, j’ai évoqué cette croyance déjà ancienne. Lui a pris la chose très au sérieux. Aussi sec, il m’a parlé d’une patiente qui ressentait des douleurs aiguës entre les omoplates. Elles s’expliquaient, à l’en croire, par des coups de poignard reçus au xve siècle, alors que la dame était assaillie par des Ottomans en plein marché. J’ai trouvé ça exotique. Poétique, presque. En même temps, je me suis retenu de rire. Quand il est question de moi, hélas, je suis incapable de la même légèreté. » Comment guérir l’obsession d’une vie ? A la créativité instinctive de l’enfance répondent les armes de l’âge adulte : l’humour et la volonté de comprendre. Entre les deux, l’amour maternel, indéfectible.